Heavy Metal Progressif [DANS LE VISEUR #6]

Puisant dans un Heavy Metal somme toute Classique, héritage des années 80, certains groupes décident progressivement d'étoffer leur musique pour déboucher sur un Heavy Metal qualifié de Progressif, à l'approche des années 90. Une musique technique, parfois avant-gardiste et qui malheureusement ne survivra guère à l'aube du nouveau millénaire, sauf pour quelques rares élus. Elus qui, parfois, se perdront en chemin. Un potentiel que je considère sous-exploité par l'industrie musicale, à tort ou à raison, bien que je penche plutôt pour à raison. Honnêtement, lorsque j'observe des mouvements à l'origine admirable et leur devenir, je crois qu'il est parfois préférable de ne pas surexploiter le filon et inonder un marché.

La musique en elle-même se veut plus raffinée - ici instrumentalement et lyriquement- et conserve néanmoins un tranchant propre au Heavy Metal conventionnel. Des albums conceptuels voient le jour. Les nord-américains de QUEENSRYCHE signent Operation Mindcrime, en 1988, par exemple. Ou, autre exemple, leurs compatriotes de SAVATAGE, à travers Streets: A Rock Opera en 1991. Ici, les deux opus cités abordent des thématiques sociales, là où d'autres vont explorer la psyché ou évoquer la politique.
Si certains musclent d'avantage leur jeu, d'autres allient des éléments Symphoniques, Néo-Classiques à leur Heavy Metal Progressif. C'est le cas d'un SYMPHONY X, d'un KAMELOT ou encore ROYAL HUNT.

Si l'émergence d'une telle vague Heavy Metal aux allures Progressif ne surprend pas aux Etats-Unis (QUEENSRYCHE, SAVATAGE, KAMELOT à ses débuts, SYMPHONY X, CRIMSON GLORY, SANCTUARY, FATES WARNING, SHADOW GALLERY, l'anecdotique LETHAL), elle s'invite en Norvège via CONCEPTION (qui donnera naissance au bâtard ARK), au Royaume-Uni à travers le désormais incontourable THRESHOLD (se référer surtout à Psychedelicatessen, en 1994), en Allemagne (le désormais estimé VANDEN PLAS, le méconnu et pourtant superbe GLENMORE - j'ose rapprocher, de loin, Insanity And Genius de GAMMA RAY à ce courant !) ou encore l'Italie (ELDRITCH), la Grèce (SANVOISEN, un nom à retenir, auteur de deux beaux disques !) et le Danemark (ROYAL HUNT).

Il y a ceux qui muteront, ceux qui péricliteront, ceux qui conserveront cet héritage. Dans tous les cas, quel formidable et foisonnante époque ! Et à l'écoute, par exemple, d'un Fragments Of Creation (2016) des grecs de SUNBURST, je constate que la flamme persiste, timidement certes, toutefois elle persiste à brûler ! A l'époque, cette volonté de casser les cloisons, de mélanger l'improbable, nous a offert des pépites que, en vieux nostalgique que je pense, l'on ne refera plus avec autant de panache ! Je ne boude toutefois pas mon plaisir lorsque des jeunes loups se frottent aujourd'hui à ce genre avec succès !